Le petit cahier de la CGT Éduc'action - n°48 page 10

CP dédoublés

Objectifs de réussite ou objectifs de moyen : Que dit la loi ?

 

Le dispositif CP dédoublé a été rebaptisé CP 100 % de réussite. La formule est apparue à l’issue du séminaire organisé à l’ESENESR qui avait vocation à accompagner la mise en place des CP dédoublés. Attention, si Eduscol est effectivement le site officiel du ministère, toutes les affirmations ou tous les documents présents sur le site n’ont pas force de loi.

 

Depuis la loi d’orientation sur l’avenir de l’École de 2005, le ministère s’est doté d’objectifs quantitatifs en termes de réussites scolaires.

 

Pour autant, la question de la liberté pédagogique était également réaffirmée. Au-delà des effets pervers de ce genre de démarche (impossibilité de réduire le métier d'enseignant·e à l'application de référentiels de compétences, ravages causés par cette approche dans les pays en développement…), l’objectif de réussite ne s’applique qu’à l’institution. Or, si celle-ci s’est fixée une obligation de résultats, elle n’a pas à l’étendre à chacun des individus qui travaillent pour elle. Nos obligations sont définies règlementairement dans le Code de l’Éducation et, pour le coup, nulle trace d’une quelconque obligation de résultats nous concernant.

 

L’expression CP 100 % de réussite est donc soit erronée, soit relève d’un autre champ, soit abusive...

 

En fait, plus qu’un objectif, il s’agit d’un slogan ou d’une opération marketing qui offre des habits neufs au dispositif déjà annoncé de CP dédoublé par Luc Ferry.

 

Cette formulation permet ainsi d’exercer une forme de pression amicale sur des collègues qui se sentent contraint·es par une obligation de résultats toute nouvelle. Pour cela, le ministère met le paquet : publication sur Eduscol pour lui donner un caractère officiel, compte-rendu de colloques et informations scientifiques pour légitimer les choses. Pourtant, aucun de ces documents n’a force de loi ou de circulaire. Au mieux s’agit-il d’une glose.

 

Pour autant, le ministère va assez loin dans le prescriptif informel : des repères pour la lecture et l’écriture qui n’ont d’autre objectif qu’informatif, comme d’autres exemples de séances d’emploi de temps et de plan de classe.

 

En conséquence, et comme on voit avancer à grand pas la volonté gouvernementale de rémunérer les fonctionnaires au mérite et aux résultats, il n’est pas étonnant que les collègues y voient un caractère obligatoire et officiel qui n’existe pas.

 

Au-delà du sentiment d’obligation lié à cet habillage ministériel, s’ajoute la pression issue des familles. Les familles ont toujours eu une forte attente autour de l’apprentissage de la lecture et le déchiffrage leur apparait majoritairement comme l’alpha et l’oméga de celle-ci.

 

Avec la médiatisation de ce procédé, tout est mis en place pour prendre les collègues en étau entre les parents et l’administration et les contraindre petit à petit en restreignant d’autant leur liberté pédagogique, sans bruit, sans rage ni violence.

 

La CGT Éduc'action vous rappelle donc que nous n’avons pas à nous soumettre à cette obligation de résultats qui reste une sorte de légende, comme celle du droit de réserve, trop souvent avancée lors de périodes de contestation.

 

Fabienne CHABERT

Elena Blond


   Publication : 18/04/18